mercredi 17 octobre 2007

Turquie VS Kudistan


La Turquie, premier de la classe des pays musulmans en une panoplie de domaines, est en train de commettre une grave erreur morale et stratégique: ce pays menace actuellement d'envahir le Kurdistan irakien. Pourquoi? Pourquoi un membre de l'OTAN, solide allié de l'Amérique et possible futur membre de l'Union Européenne voudrait-il remettre tant de liens importants en question en attaquant une région d'un pays actuellement sous protectorat américain? Pourquoi la Turquie voudrait-elle, tout spécialement dans ce contexte, faire la guerre à un pays? Et pourquoi, tout particulièrement, vouloir faire la guerre à un Irak actuellement sous contrôle des États-Unis?

Une première raison pourrait être de vouloir vexer les États-Unis, suite au vote du congrès sur la reconnaissance historique du génocide arménien (que l'Empire Ottoman a commis entre 1915 et 1916). La Turquie moderne a toujours refusé de reconnaître la validité historique de ce terrible événement. Donc, l'idée de la boutade d'Ankara face à Washington n'est pas fausse mais elle n'est certainement pas le point central du problème.

La réponse se trouve au sein d'un des plus grands problèmes pour l'État Turc: les Kurdes. Les Kurdes forment un peuple divisé entre plusieurs pays, principalement la Turquie (20 à 25 millions), Iran (5 à 6 millions), Irak (5 millions), Syrie (près de 1 million) ainsi que de petites minorités en dehors de ceux-ci. On peut donc comprendre, simplement par ces chiffres, que le peuple Kurde n'est pas qu'une petite tache sur la carte du Moyen-Orient et que pour toute État essayant d'avantager une culture locale afin d'en supprimer d'autres (comme le fait la Turquie envers ses minorités), une telle masse de population exogène est une remise en question constante. Officiellement et historiquement, il n'existait même pas de Kurdes en Turquie (enfin, selon l'État Turc). Il y avait bien des gens un peu différent des Turcs, un peuple bizarre habitant dans le sud-est mais ceux-là étaient officiellement des Turcs des Montagnes (nom inventé par les autorités turques)... C'est bien pour montrer le négationnisme historique total de l'État Turc face à cette minorité (ils ne sont d'ailleurs pas les seuls, parlez en aux Arméniens...). Parler kurde était illégal, tout comme une panoplie d'auters choses. S'en était au point même que de danser les danses traditionnelles de ce peuple était devenu hors la loi. La Turquie a évidemment évoluée et s'est même peut-être un peu assoupli, depuis Atatürk mais l'essentiel reste tout de même: les kurdes sont toujours considérés comme une minorité que la Turquie se doit d'absorber et d'assimiler. D'ailleurs la désinformation existe toujours sur le sujet, la Turquie ne reconnaissant l'existence que de 14 millions de kurdes sur son territoire (loin du 20 à 25 millions habituellement estimé).

Avec le temps, les mauvais traitement et la rancune venant avec, les Kurdes résidant en Turquie se sont créés, en 1978, le PKK (Parti des Travailleurs du Kurdistan), afin de représenter leurs intérêts mais aussi de mener une guerre de libération contre l'oppresseur Turc. Les affrontements entre l'État turc et le PKK ont causé jusqu'à maintenant, approximativement, 30 000 morts. C'est donc à cause de ce PKK et des problèmes sociaux importants qu'il entraîne en Turquie, par exemple la semi guerre civile entre l'armée et le PKK, que le pays envisage maintenant l'attaque du Kurdistan irakien.

Aujourd'hui, la Turquie affirme que le Kurdistan irakien est devenu la base arrière du PKK et que si l'Irak ne fait rien, et la Turquie ne croit pas que l'Irak est en état de faire quoi que ce soit, alors il ne reste plus qu'à l'armée turque de traverser la frontière afin d'aller exterminer les terroristes (ou résistant, dépendamment du point de vue) kurdes en territoire irakien. Encore plus, sa serait l'occasion rêvée, pour la Turquie, de détruire toute tentative de création d'un Kurdistan indépendant. La Turquie avait avertit les États-Unis, avant qu'ils n'attaquent l'Irak en 2003, que l'éventualité d'un pays nommé Kurdistan était pour eux une impossibilité complète et l'autonomie actuelle du Kurdistan irakien leur fait beaucoup trop penser à de l'indépendance, donc c'est le moment de piétiner le château de cartes avant qu'il ne prenne racine, qui sait sinon ce que cet exemple de liberté pourrait causer dans la région kurde de la Turquie...

Si la Turquie s'entête, il est évident que le sang va couler. Comment ce pays peut-il penser avoir, un jour, accès à l'Union Européenne avec une telle attitude envers ses voisins et sa propre population? Comprenez moi bien, je ne veux nullement impliquer que le PKK est une kermesse d'anges mais il est évident qu'un peuple représentant des dizaines de millions d'individus a le droit d'être reconnu et de pouvoir librement vivre sa culture. Quelqu'un devrait expliquer aux Turcs que l'on est plus au 19ième siècle et qu'il ne suffit pas de massacrer et terroriser afin d'être considéré comme un bon État-Nation puissant et responsable... Ça ne devrait pas obliger la Turquie à accepter n'importe quoi mais au moins à négocier de bonne foi!

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